LAURÉATE DU PRIX BRIGITTE SCHNEGG 2021

Dre FATEN KHAZAEI

La lauréate du prix Brigitte Schnegg 2021 est Dre Faten Khazaei, pour sa thèse de doctorat intitulée "Manufacturing Difference: Double Standard in Swiss Institutional Responses to Intimate Partner Violence" (2019).

Faten Khazaei est actuellement chercheuse postdoctorale en sociologie à l'Université Goldsmiths de Londres. Son travail se situe à l'intersection des études genre, des études critiques de la race, mais aussi de la sociologie des migrations, des institutions et de la violence. Elle étudie la manière dont les institutions et les acteurs étatiques, en traitant les problèmes sociaux, participent, créent, normalisent et/ou naturalisent les catégories relatives à la nationalité, la migration, le genre, la classe, la "race" et l'ethnicité dans leur discours et leurs pratiques. Son approche empirique englobe des méthodes de recherche qualitatives, notamment l'ethnographie publique et institutionnelle ainsi que des entretiens avec des expert·es. Ses recherches actuelles portent sur la manière dont la mission de protection de l'enfance reproduit/renforce l'ordre social genré et ethno-racial au nom de l'intérêt supérieur des enfants.

Court résumé de la thèse:

La thèse analyse comment les approches institutionnelles de la violence entre partenaires intimes (VPI) sont genrées et racialisées dans le contexte migratoire suisse. Par le biais d'une étude ethnographique détaillée d'un commissariat de police, d'un centre d'accueil et d'une unité hospitalière dans un canton de Suisse romande, la thèse montre comment les professionnel·les psychologisent et individualisent les victimes et les auteurs suisses blancs et ignorent les dynamiques de pouvoir sexuées qui sous-tendent la VPI. En revanche, lorsque les victimes sont construites comme des personnes "immigrantes" non-occidentales, l'analyse de genre revient à travers l'idée que les relations familiales non-occidentales sont façonnées par des pratiques de genre très inégales et culturellement ancrées. Ce faisant, la dimension structurelle de la VPI et une lecture féministe de celle-ci sont introduites de manière très déformée en postulant une culture migrante violente par opposition à une société suisse qui serait apparemment non-violente. Ce double standard, qui consiste à rendre visibles les relations de pouvoir entre les sexes dans certains cas, et à les occulter dans d'autres, conduit à la perception de différences ethno-raciales qui sont ensuite assimilées à des différences morales entre "nous" et "eux". Ce travail de doctorat met également en lumière la façon dont ces dynamiques racialisées et genrées, mises en évidence par l'enquête ethnographique, finissent par desservir toutes les victimes de VPI, dans la mesure où les contextes structurels de la violence sont ignorés, soit par une individualisation psychologisante, soit par une racialisation homogénéisante.

MENTION HONORABLE

Dre LEANDRA BIAS

Une mention honorable est décernée à Dre Leandra Bias pour sa thèse intitulée "The (Im)Possibility of Feminist Critique in Authoritarianism: Revisiting Western Knowledge-Transfer in Russia & Serbia" (2020).

Dre Leandra Bias est née et a grandi à Zurich. Après avoir obtenu son diplôme de premier cycle à l'Université de Genève, elle suit des études post-grade et effectue son doctorat à Oxford au Royaume-Uni grâce à divers financements. Au cours de son doctorat en sciences politiques, elle a bénéficié de bourses d'études au Graduate Institute de Genève, à l'Université de Vienne ainsi qu'en Russie et en Serbie où elle a effectué un travail de terrain approfondi. Tout au long de ses études, elle s'est toujours concentrée sur des thèmes féministes et a également été active au sein des mouvement féministes de la société civile. Elle travaille actuellement en tant que gender advisor & senior researcher pour Swisspeace et est chargée de cours à l'Université de Bâle.

Court résumé de la thèse:
Dans sa thèse, Bias revisite la critique bien établie selon laquelle le féminisme transnational se résumerait à un exercice d'altération, se manifestant par un transfert unidirectionnel de connaissances de l'Ouest vers l'Europe post-communiste. En se basant sur les exemples de la Russie et de la Serbie, Bias soutient que cette forme de critique résonne dangereusement avec les discours des régimes autoritaires qui prétendent que le féminisme et "l'idéologie du genre" seraient une ruse occidentale et étrangère. Du point de vue des féministes russes et serbes, une telle résonance est profondément risquée et doit être évitée. C'est pourquoi celles-ci rejettent cette critique et proposent plutôt des imaginaires alternatifs du féminisme transnational qui dépassent les cadres Est-Ouest et maître-élève